jeudi 5 juillet 2012

Retour sur la phase 2 de la MISA: le développement de la solution préliminaire


Lors de la Phase 1 de la MISA (Méthode d’ingénierie des systèmes d’apprentissage) j’avais trouvé la méthode très rébarbative. Il s’agissait alors de monter le dossier de définition du projet, une partie fort peu créative du projet. Il en va tout autrement avec la Phase 2 : le développement de la solution préliminaire.
Cette deuxième phase de la méthode nous amène à expliciter le modèle de connaissances sous-jacent au système d’apprentissage que l’on veut développer, puis à placer les premiers jalons du modèle pédagogique, du modèle médiatique et du modèle de diffusion. Et à cette étape, la pensée créative trouve sa place et l’on commence à ressentir l’impatience de voir se matérialiser le produit final, ce qui est source de beaucoup de motivation.
Les éléments de documentation qui doivent être élaborés à cette étape sont les suivants :
210 – ORIENTATION DU MODÈLE DES CONNAISSANCES  
 214 – TABLEAU DES COMPÉTENCES           
 220 – ORIENTATIONS PÉDAGOGIQUES     
 230 – ORIENTATIONS MÉDIATIQUES         
 240 – ORIENTATIONS DE DIFFUSION        
Bien entendu, j’ai encore peiné sur le jargon de la  MISA. À cet effet, le glossaire (Paquette, Léonard et al. 2011), la description des éléments de documentation (Paquette, Léonard et al. 2011) et le guide du projet (Basque 2011) m’ont été d’une grande utilité.
L’élaboration du modèle de connaissances et du réseau des évènements d’apprentissage a été effectuée à l’aide du logiciel MOTPlus (LICEF), développé par le LICEF de la TÉLUQ. J’avais déjà utilisé le logiciel mais sans en exploiter toutes les fonctionnalités. L’exercice m’a amenée à saisir la précision qu’il faut déployer dans un projet d’ingénierie et j’ai trouvé l’exercice fort intéressant car il permet de structurer le SA, d’en avoir une vision d’ensemble et d’imaginer des scénarios pédagogiques créatifs. Et c’est aussi à cette étape que j’ai eu le plus de défis.
Mon premier défi a été de préciser les connaissances dans le modèle de connaissances. J’avais tendance à confondre connaissances et résultats de cours. Ainsi, dans le cours d’Orientation qui fait l’objet du projet, l’apprenant doit valider son choix de carrière. S’il s’agit d’une activité ponctuelle alors on ne peut considérer cette activité comme une connaissance procédurale. Cependant, s’il s’agit pour l’étudiant d’apprendre à valider périodiquement ses choix de programme et de carrière pour s’auto-motiver, alors on peut parler de connaissance.
Le second défi auquel j’ai fait face a été d’identifier les connaissances principales dans le modèle de connaissances. Une fois assimilée (et ça m’a pris du temps!) la notion de connaissance principale, il fallait que j’identifie, parmi les multiples connaissances, celles qui constituaient des connaissances principales et celles qui étaient des connaissances secondaires. Après une quinzaine de modifications de mon modèle, je suis finalement arrivée à limiter ces connaissances principales à 8, alors que j’avais commencé avec une bonne quinzaine. Mais ce travail rigoureux a été très exigeant et m’a parfois laissée totalement confuse.
Le Réseau des évènements d’apprentissage a été, toutes proportions gardées, plus facile à développer.
Le travail sur le modèle pédagogique m’a aussi questionnée sur mes choix de scénarios d’apprentissage. L’orientation initiale du cours (tel qu’il existait auparavant) était une orientation typiquement cognitive avec des scénarios d’apprentissage par réception. Or en constatant qu’une partie des connaissances que l’on souhaite développer chez les apprenants relève de la métacognition, on réalise que sans dimension réflexive dans la démarche on peut ne jamais parvenir à notre objectif. Cette prise de conscience m’a amenée à modifier les orientations pédagogiques du SA, pour y inclure des productions et une activité collaborative.
Dans cette expérience, parmi les trois types de tâches réalisées au cours de cette phase du projet d’ingénierie technopédagogique, la formulation de principes décrivant les orientations à donner aux divers axes de votre environnement d’apprentissage informatisé, m’a aussi posé des problèmes par le caractère abstrait de la démarche. Probablement par manque d’expérience, j’étais dans l’incapacité de définir a priori des orientations pour le SA. J’ai (bien honnêtement) déterminé les orientations pédagogiques  a posteriori, à l’issue de l’élaboration des modèles.
La construction d’un tableau des compétences est probablement l’activité que j’ai trouvé la plus facile, bien que la rédaction des énoncés constitue toujours un défi. Il faut dire que mon expérience m’a préparée à ce type de tâche. Je viens durant toute l’année qui s’achève, de reconfigurer le cursus du programme que je coordonne, et de réécrire les plans de cours, en rédigeant des Résultats d’apprentissage de cours et des Indicateurs de réussite à partir de la taxonomie de Bloom (Université de Paris Descartes 2005).
 

Références



mercredi 27 juin 2012

L'utilisation de la MISA pour un projet d'ingéniérie technopédagogique


  1. Dans le cadre  du cours TED-6313 de mon DESS en Technologie éducative à la TÉLUQ, je développe un projet d’ingénierie technopédagogique, à partir de la méthode MISA (Paquette, Léonard et al. 2011)  destiné à développer un cours en auto-formation pour un cours d’« Orientation » d’un programme technique de niveau collégial.
  2. La méthode MISA (Méthode d’ingénierie des systèmes d’apprentissage) développée par le LICEF à la TÉLUQ propose donc une démarche très structurée de conception de systèmes d’apprentissage.
« Faire l’ingénierie d’un système d’apprentissage (SA) est un processus qui couvre toutes les activités de conception d’un SA, depuis l’identification des besoins d’apprentissage et de formation jusqu’à la mise en place du produit qui permettra aux apprenants de réaliser ces apprentissages, c’est-à-dire le système d’apprentissage.
La démarche d’ingénierie pédagogique permet aux différentes personnes qui collaborent à la conception et à la réalisation d’un SA de travailler efficacement et de prendre les bonnes décisions tout au long de son élaboration. MISA leur permet en effet de prendre appui sur des activités structurées, de se donner des jalons pour suivre l’avancement de leurs travaux et d’obtenir des représentations de plus en plus près du format final du SA. » (Paquette, Léonard et al. 2011)
La MISA comporte 6 grandes phases :
1. Définir le projet de formation et adapter MISA
2. Définir une solution préliminaire
3. Concevoir l’architecture du SA
4. Concevoir les matériels pédagogiques
5. Valider les matériels
6. Préparer la diffusion du SA
  1. La première étape du projet consistait à produire le Dossier de définition du projet de formation. Les éléments à préciser au cours de cette phase étaient les suivants :
    • 100 – Cadre de formation de l’organisation
    • 102 – Objectifs de la formation    
    • 104 – Publics cibles
    • 106 – Contexte actuel         
    • 108 – Ressources existantes        
  2. Pour parvenir à cet objectif, j’ai recueilli et analysé l’information nécessaire à la réalisation du projet. L’information colligée provenait :
    • De mon expérience comme enseignante du cours à plusieurs reprises,
    • Des informations privilégiées recueillies à travers ma participation à un groupe de travail sur le cours d’ « Orientation »,
    • Des évaluations d’enseignement complétées par les étudiants,
    • De documents internes à l’organisation,
    • Du site web du collège.
  3. Qu’est-ce que la réalisation de cette phase de mon projet m’a permis d’apprendre?
    • Le principal enseignement que je retire de cette première phase du projet de SA en utilisant la MISA est l’importance de la rigueur du processus. En considérant chacun des aspects imposés par le modèle on s’assure que toutes les dimensions de la situation ont été intégrées dans le projet : pratiques pédagogiques, priorités stratégiques, profils de clientèles, ressources, contraintes etc.
    • Bien entendu, compte-tenu de mon implication dans le projet, de la quantité d’information déjà disponible et de ma connaissance approfondie de l’organisation, de la réflexion collective continue que les professeurs du secteur et moi-même effectuons et des échanges qui en découlent, le recueil de données a été simplifié. Il n’a pas été nécessaire d’effectuer un recueil de données primaires. J’ai pu simplement exploiter les données secondaires à ma disposition. Celles-ci étaient largement suffisantes pour alimenter le projet.
    • En fait, je pense qu’une grande partie de l’information synthétisée dans le rapport du projet n’était pas indispensable à la prise de décision d’aller de l’avant ou non avec le projet. Ainsi, toute l’information concernant l’organisation et les pratiques générales d’enseignement de l’organisation n’étaient pas nécessaires à la prise de décision dans le cadre de ce projet. J’ai recueilli et analysé l’information nécessaire au fur et à mesure de l’écriture des sections mais dans ce cas particulier, je considère que j’ai passé beaucoup de temps à recueillir des données secondaires sur de l’information que je connaissais déjà, simplement pour justifier les décisions prises par rapport au projet. Cette partie du travail a été particulièrement fastidieuse. Cependant, encore une fois, je me trouvais dans une situation particulière et je perçois l’utilité du processus dans la grande majorité des situations.
    • J’aurais pu consulter davantage de personnes de l’organisation, en particulier pour valider la synthèse de l’information que j’ai effectuée mais j’ai décidé de sursoir pour deux raisons :
      • L’ampleur limitée du projet (qui vise un seul cours dans un programme) ne justifiait pas  d’investir davantage en recueil d’information;
      • L’organisation vit de profondes perturbations actuellement (réorganisation majeure, changements de directions, changements de système de gestion de l’apprentissage, gel des dépenses et de l’embauche etc.). Dans ce contexte, il était difficile de solliciter les décideurs.
    • J’aurais pu prendre l’initiative de créer un nouveau groupe de réflexion pour repenser le cours d’ « Orientation » mais cela se serait traduit par des délais majeurs dans la réalisation du projet. Il semblait plus efficace de réaliser le projet, c’est-à-dire de concevoir et produire le Système d’Apprentissage pour un programme particulier d’abord et de proposer, le cas échéant, de l’adapter à d’autres programmes par la suite.
    • J’aurais aussi pu consulter davantage les étudiants en organisant des groupes de discussion pour recueillir leurs suggestions mais ayant enseigné le cours pendant plusieurs années et ayant eu de nombreux  échanges avec les étudiants à ce sujet, il me semblait peu rentable de s’investir dans l’organisation d’une telle activité. Par ailleurs, la période de temps durant laquelle le projet a été réalisé n’était pas propice.
    • Malgré le caractère fastidieux de la démarche, dans le cas particulier de ce projet, j’en perçois tout à fait l’utilité car l’exercice m’a permis de structurer l’information dans ma tête et d’avoir une vue d’ensemble des facteurs pouvant influencer la réussite du projet.
    • Ma compréhension et mon appréciation de la MISA :
      • La MISA est une méthode dont la logique est facile à comprendre. Elle se rapproche des modèles de gestion des innovations tels que le modèle Stage Gate de Robert Cooper (Riopel P., Dionne N. et al. 2004). La complexité de la démarche se situe, au départ dans la compréhension de la terminologie utilisée. À cet égard, le Guide de réalisation du projet d’ingéniérie technopédagogique (Basque 2011) a été d’une grande utilité, de même que les documents descriptifs de la méthode développés par le LICEF (Paquette, Léonard et al. 2011), en particulier le  glossaire.
      • La partie la plus complexe de la synthèse, en ce qui me concerne, a été le niveau d’analyse à effectuer : du niveau micro au niveau macro. Ainsi, travaillant dans l’enseignement au niveau collégial, devais-je analyser les pratiques pédagogiques au niveau du programme, du secteur, de l’école ou du Ministère? Jusqu’où faut-il aller? Pour moi, la difficulté s’est située à ce niveau. Devrais-je prendre en considération les directives ministérielles concernant le développement de programmes de formation pour le développement d’un cours dont les objectifs et le contenu ne changeront pas?
      • Selon moi, dans le cas de projet intra-entreprise, la première étape de la MISA pourrait considérablement être simplifiée, non pas qu’il ne faille pas prendre en considération tous les facteurs mentionnés dans le descriptif de la méthode mais en limitant l’importance accordée à l’ED 100, cadre de formation de l’organisation, et surtout en limitant l’ampleur du recueil de données associé à cette partie de l’analyse
      • En conclusion, je considère la MISA comme une démarche très robuste mais complexe, qui combine les bénéfices d’une approche de gestion des innovations avec les pratiques pédagogiques les plus rigoureuses.
 

Références


           
           
           

vendredi 14 mai 2010

4. Analyse critique du projet de wiki

Analyse critique
Suite à l’évaluation présentée dans mes deux messages précédents j’en arrive aux conclusions suivantes concernant mon projet d’utilisation du wiki.

1. Globalement, l’expérience d’utilisation du wiki dans le cours de promotion des ventes a été modérément réussie.

a) Le projet a contribué, pour les étudiants, à l’atteinte de certains objectifs du cours, en particulier développer leur connaissances des méthodes de promotion des ventes. En l’absence de volume obligatoire pour le cours, il a aussi permis de mettre à la disposition des étudiants une base d’information et de liens facilitant leur étude en vue des examens;

b)Dans l’un des deux groupes, le projet a suscité l’enthousiasme et une excellente participation des étudiants, démontrant ainsi le potentiel de mobilisation du wiki. Ainsi le nombre moyen d’éditions dans le groupe 010 (en moyenne 61 éditions/étudiant) est largement supérieur à celui relevé dans d’autres études (14 dans l’étude de Nordin et Klobas, 2009).

c) L’outil Wikispaces s’est avéré très approprié pour un travail de classe. Les étudiants en ont rapidement maîtrisé les principales fonctionnalités. Certains étudiants ont même développé par la suite leur propre wiki.

d) Au niveau du scénario pédagogique, certains points positifs sont à noter:

  • Le scénario d’encadrement adopté a, dans l’ensemble, bien fonctionné :
    - le soutien fourni aux étudiants, sous forme de formation initiale, d’instructions sur le wiki et de documentation semble avoir été approprié,
    - les activités de démarrage comme la réalisation de la page de présentation des équipes ont bien fonctionné au moins dans un des deux groupes
    - la grande liberté accordée aux étudiants et les interventions minimales du professeur/animateur consistant essentiellement à encourager les étudiants ou à corriger des erreurs de contenu semblent avoir été suffisantes au moins dans l’un des deux groupes.
  • La méthode d’évaluation (évaluation individuelle fondée sur la contribution) ainsi que les critères d’évaluation utilisés ont eu l’air de convenir aux étudiants.

2. Cependant, différents facteurs ont minimisé l’efficacité pédagogique du projet. Le principal problème a porté sur la faible proportion de travail réellement collaboratif durant le projet.

L’évaluation m’a permis d’identifier trois facteurs ayant influencé négativement le projet : des faiblesses au niveau du scénario pédagogique et du scénario d’encadrement, les caractéristiques des étudiants et l’inexpérience du professeur.

a) Limites du scénario pédagogique et du scénario d’encadrement

  • Le choix du travail à effectuer sur le wiki (travail de recherche) était peu propice à la collaboration, les équipes étudiantes ayant le loisir comme dans tout projet d’équipe traditionnel, de partager le travail entre les membres de l’équipe. Dans leur projet, Nordin et Klobas utilisaient un travail de recherche individuel comme une initiation au travail sur le wiki et concluaient que même si les étudiants ne collaboraient pas vraiment, le fait de mettre les recherches en commun sur le wiki constituait une familiarisation avec les communautés de savoir (2009, p.6). Pour pallier ce problème, Temperman et al. (2009) suggèrent un scénario pédagogique en deux étapes : une étape de recherche individuelle (correspondant à l’analyse dans la taxonomie de Bloom) et une étape de collaboration dans laquelle les étudiants doivent mettre en commun, structurer et synthétiser l’information (correspondant à la synthèse dans la taxonomie de Bloom).
  • La faible proportion de la note attribuée à la partie collaborative du projet (20% de la note de projet qui comptait pour 20% de la note du cours) n’a pas non plus encouragé les étudiants à sortir de leur zone de confiance et à se lancer dans l’aventure inconnue de la collaboration.
  • Au niveau du scénario d’encadrement, un suivi plus serré et des appels répétés à la collaboration seraient peut-être venus à bout des réticences des étudiants du groupe 020. Pour ce qui est de l’animation, j’aurais pu motiver davantage les étudiants en leur soulignant la visibilité de leur travail par les internautes de différents pays et développer ainsi une fierté du travail accompli.

b) Les facteurs liés au étudiants
Le manque d’expérience des étudiants avec des activités de nature collaborative est le deuxième grand facteur qui explique le faible niveau de collaboration dans le projet. Ce problème est rapporté par de nombreux chercheurs comme par exemple Lund et Smørdal (2006, p.41): « Learners did not immediately embrace any notion of collective ownership or epistemology but continued a practice where the institutionally cultivated individual ownership persisted. »

Ce manque d’expérience a été d’autant plus critique que les étudiants étaient jeunes (donc manquant de maturité) et pour plusieurs d’entre eux, peu motivés. La concentration des étudiants peu motivés dans un des deux groupes a résulté en une dynamique de groupe conflictuelle, qui explique l’écart de participation et de collaboration entre les deux groupes.

Pour limiter le problème d'acceptation de la technologie, certains enseignants comme Carmen Lebherz, Ulf-Dietrich Reips et Klaus Jonas (2008),utilisent le wiki comme support à toutes les activités de production des étudiants durant le cours (critiques d'articles, rédaction d'un glossaire), pour le stockage du matériel du cours et pour les communications entre les membres du groupe en utilisant les fonctions forum et courriel. Ces auteurs ont identifié que certains étudiants utilisaient encore certaines pages du wiki un an après la fin du cours (le glossaire en particulier).

c) Les facteurs liés au professeur
Finalement, mon inexpérience en matière de wiki a limité mon efficacité, en particulier au niveau du choix de la tâche à accomplir et au niveau de l’animation. Une deuxième tentative serait probablement beaucoup plus réussie.

Conclusion
Mes attentes par rapport au projet étaient de :
- de pouvoir me familiariser un nouvel outil pédagogique collaboratif,
- de pouvoir expérimenter cet outil dans le cadre de mon activité d’enseignement;
- De pouvoir étudier les « affordances » et les limites de cet outil dans le contexte des cours que j’enseigne ;
- De pouvoir améliorer ma pratique pédagogique en tirant avantage des affordances de cet outil.

Le projet a dans l’ensemble répondu à mes attentes. Bien sûr, je n’ai pas cerné dans cette seule expérience toutes les "affordances" et limites du wiki mais j’ai progressé dans cette direction. Suite à cette expérience, je conclus que le wiki a un potentiel pédagogique intéressant. Il a tout à fait sa place dans l’enseignement technique de niveau collégial. Cependant, c’est un outil difficile à utiliser car il requiert, de la part du professeur, une certaine expérience et il exige que l’on porte beaucoup d’attention au développement du scénario pédagogique et que l’on investisse du temps au niveau de l’animation et de l’encadrement.

Bien qu’ayant été un peu déçue, a priori, par le manque de collaboration entre les étudiants, j’ai réalisé, suite à cette analyse, qu’en fait, le projet constitue une première étape dans la maîtrise des méthodes d’apprentissage collaboratif, à la fois par les étudiants et par le professeur. Forte des connaissances acquises, je me sens prête à répéter l’expérience. Comme le dit le poème :

«Hâtez-vous lentement ; et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez ;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. » (Nicolas Boileau, Extrait de L'Art poétique).

Le blog
Ce blog est l’un des éléments d’évaluation du cours EDU 6022 que je termine à la TÉLUQ en écrivant ces lignes. Il s’agissait de ma première expérience comme « bloggeuse » et je dois avouer que j’ai particulièrement apprécié de partager mon vécu. Lorsque j’ai voulu exploiter les nouvelles technologies dans le cadre de mon enseignement, j’ai été à l’affût de tous les compte-rendus d’expérience effectuées par d’autres enseignants. Je me suis inspirée des recommandations de tous ceux qui, avant moi, ont expérimenté wikis, forums de discussion et partagiciels. Je leur suis reconnaissante d’avoir mis à la disposition de la communauté enseignante les résultats de leurs expériences. À mon tour de faire de même. J’espère que d’autres enseignants trouveront ce compte-rendu utile.

Je poursuivrai le projet d’expérimentation du wiki lors de l’année scolaire 2010-2011, avec deux phases, une à l’automne et l’autre à l’hiver, et je reprendrai alors mes compte-rendus sur ce blog.

Merci d’avance pour les commentaires et les suggestions des lecteurs.

Références :
Lebherz, C., Reips, U., and Jonas, K. (2008). Building knowledge online: master students' use and evaluation of wiki and forum. In Proceedings of the 8th international Conference on international Conference For the Learning Sciences - Volume 3. International Conference on Learning Sciences. International Society of the Learning Sciences, 405-406. Retrieved, April 15, 2010 from http://www.fi.uu.nl/en/icls2008/110/paper110.pdf

Lund, A. and Smørdal, O. (2006). Is there a space for the teacher in a WIKI?. In Proceedings of the 2006 international Symposium on Wikis. WikiSym '06. ACM, New York, NY, 37-46. DOI: http://doi.acm.org/10.1145/1149453.1149466

Nordin, N., Klobas, J. (2009). Wikis as collaborative learning tools for knowledge sharing: Shifting the education landscape . Paper presented at the 13th UNESCO-APEID International Conference on Education, 1-12. Retrieved March 14, 2010 from http://www.unescobkk.org/fileadmin/user_upload/apeid/Conference/13th_Conference/Papers/5.B.2._Wiki_as_Collaborative_Learning_Tools_for_Knowledge_Sharing_Shifting_the_Education.pdf

Temperman, G., De Lièvre, B. et Lenz, D. (2009). Écrire à plusieurs mains dans un wiki : analyse croisée des processus et des perceptions des apprenants in Develotte C., Mangenot F., Nissen E. (2009) Actes du colloque Epal 2009, 1-13. Retrieved November 8, 2009 from http://w3.u-grenoble3.fr/epal/dossier/06_act/pdf/epal2009-tempermann-delievre-lenz.pdf

mercredi 12 mai 2010

3. Évaluation détaillée du projet de wiki

Dans ce troisième message, je reprends en détail chacune des bases d’évaluation présentées dans la grille.

Évaluation du succès du wiki
a. La participation au wiki
De toute évidence, un des deux groupes a été beaucoup plus actif sur le wiki. J’ai utilisé deux mesures pour évaluer la participation au wiki : le nombre d’éditions effectuées par les étudiants (statistiques fournies par Wikispaces) et la longueur du texte principal (sujet de recherche attribué) déposé sur le wiki. Les deux graphiques qui suivent présentent les données de participation des deux groupes. On peut facilement y constater que le groupe 010 a été beaucoup plus actif que le groupe 020. Les contributions des étudiants du groupe 010 ont été beaucoup plus régulières et beaucoup plus nombreuses.


En moyenne, les étudiants du groupe 010 ont édité 61 pages contre moins de 13 pour le groupe 020 et la longueur de leurs textes a été de 1087 mots contre 847 mots pour le groupe 020.
C’est essentiellement la dynamique de groupe très vindicative du groupe 020 qui explique cette résistance. Nous reviendrons sur ce point plus tard.

b.Préparation au travail collaboratif
Un objectif principal du travail sur le wiki étant de favoriser les habiletés collaboratives chez les étudiants nous avons sondé les perceptions des étudiants relativement à ce point.
Le groupe 010 a évalué le potentiel du wiki à favoriser la collaboration de façon plus positive, avec des scores moyens de 3 et 3,5 pour les deux énoncés considérés. Cependant, on réalise que les objectifs n’ont pas été atteints dans ce projet pour le groupe 020. Les évaluation des étudiants indiquent qu’ils ne perçoivent pas d’amélioration significative de leurs habiletés de collaboration suite au projet sur le wiki.

c. Contribution aux objectifs d’apprentissage du cours
Dans l’ensemble, les étudiants considèrent qu’ils ont appris modérément sur la promotion des ventes à travers le wiki. Sur leur sujet, leurs connaissances ont été améliorées mais ils considèrent qu’un projet de recherche traditionnel aurait donné le même résultat. J’ai reçu les commentaires de plusieurs étudiants qui disent, par ailleurs, ne pas avoir utilisé le blog comme outil de révision pour leurs examens. Cette situation est conforme au fait que les étudiants de niveau collégial ne lisent pas, pas même leurs manuels de cours.
Dans ce contexte, je confirme la conclusion des étudiants selon laquelle, sans avoir été nulle, la contribution du blog aux objectifs du programme n’a pas été supérieure à celle d’un projet de recherche ordinaire.

d. Succès général
Étonnamment, malgré leurs nombreuses critiques, la satisfaction des étudiants concernant leur expérience avec le wiki est plutôt bonne, particulièrement dans le groupe 010 (niveau de satisfaction de 3,5/5 dans le groupe 020 et de 4 dans le groupe 010) et la majorité des étudiants souhaiteraient que le wiki auquel ils ont contribué soit conservé.
Par ailleurs, il est intéressant de constater qu’il existe une corrélation entre le niveau de participation des étudiants et leur niveau de satisfaction. Le graphique ci-contre démontre que les étudiants qui ont le plus participé ont eu un niveau de satisfaction supérieur.

Ma perception concorde avec celle des étudiants, à savoir que malgré les critiques qu’en ont fait les étudiants du groupe 020, l’expérience de wiki a été plutôt encourageante pour une première expérience.

Dimensions de l’activité wiki
a. La tâche
Les étudiants ont considéré, et probablement avec raison, que la tâche consistant à effectuer des recherches sur les différentes méthodes de pomotion des ventes était peu appropriée à la collaboration.

En effet, bien que j’ai encouragé les étudiants à partager la rédaction, ils ont eu tendance à revenir à leurs habitudes de répartir les différentes sections du travail entre les membre de l'équipe, ce qu’un travail de recherche permet. Si la tâche avait consisté en une résolution de problème par exemple, ils auraient été obligés de collaborer davantage.

b. Les étudiants
Les étudiants se sont pour la plupart perçus comme démontrant de la maturité et de l’implication par rapport au projet comme le montre le graphique sur l'auto-perception des étudiants.

Curieusement, les étudiants du groupe 020, à plus faible implication, se sont mieux auto-évalués que ceux du groupe 010. D’ailleurs on note (voir graphique suivant) une corrélation négative entre la participation réelle des étudiants (nombre d’éditions) et leur auto- évaluation. On peut penser qu’il s’agit là d’un mécanisme d’auto-protection de l’estime de soi.

En tant qu’enseignante, j’ai pour ma part observé chez quelques étudiants (par ailleurs leaders d'opinion) un manque de maturité, d’implication et une volonté de travailler le moins possible donc surtout de ne rien entreprendre de différent.

c. Le wiki
Le wiki a été raisonnablement bien évalué par les étudiants. L’outil semblait leur convenir. Il est intéressant de noter que l’évaluation globale des étudiants du groupe 020 est supérieure, sauf pour les fonctions spécifiques qu’ils ont moins utilisées (forum, courriel, historique et «changement récents».)
En tant qu’enseignante, je considère que Wikispaces a répondu à mes attentes. La seule faiblesse de l’outil (qui n’a d’ailleurs pas affecté les étudiants) est la difficulté d’avoir un portrait global des contributions par membre. Il a fallu, pour évaluer les étudiants, que j’ai recours à un fil RSS.

d. Les ressources mises à la disposition des étudiants
Les ressources mises à la disposition des étudiants semblent avoir été appropriées, les étudiants ayant accordé des notes variant de 4 à 4,5 sur ces dimensions.

e. La répartition du travail dans les équipes
La répartition du travail entre les équipes et à l’intérieur des équipes a été problématique. Tout d’abord il s’est avéré que le travail de recherche était beaucoup plus difficile pour certains des sujets et que les différents sujets ne correspondaient pas à des quantités de travail équivalentes. Il s’agit d’une erreur de ma part de n’avoir pas mieux anticipé la quantité de travail correspondant à chacun des thèmes. La répartition du travail a l'intérieur des équipes a posé le même problème, les étudiants ne sachant pas, a priori, quelle quantité de travail était impliquée pour chacune des parties du projet.

f. Le rôle du professeur vs le rôle des étudiants
Le niveau d’intervention du professeur et le degré de latitude laissé aux étudiants semblent avoir été apprécié (les deux dimensions obtiennent des évaluations moyennes supérieures à 4).
En tant qu’enseignante, je pense que j’aurais pu intervenir plus fréquemment afin de motiver davantage les étudiants et leur donner une rétroaction plus immédiate.

g. Les équipes de travail
Dans l’ensemble, la méthode de constitution des équipes (laissée à la discrétion des étudiants) n'a pas posé de problème majeur. Cependant, la méthode d'attribution au hasard des sujets aux équipes a posé un problèmes à certaines équipes de deux personnes qui se sont retrouvées avec les dossiers les plus volumineux.

h. Les exigences du professeur
Les exigences de contenu, de présentation, l’obligation de respecter la Nétiquette et le mode d’évaluation par le professeur n’ont pas posé de problèmes majeurs. La quantité de travail impliquée par la participation au wiki a cependant fait l’objet de plaintes de la part de certains étudiants, en particulier ceux qui se sont impliqués seulement à la fin du projet. Certains étudiants ont critiqué la multiplicité des bases d’évaluation du cours et trouvé que le wiki était de trop.

i.Le groupe
La dynamique du groupe 020 a été la source de multiples problèmes au cours du projet. Certains étudiants, leaders d’opinion, se sont opposé au projet dès sa présentation et ont créé une dynamique négative qui explique les écarts entre la participation et les perceptions des deux groupes d’étudiants. Les étudiants ont d’ailleurs été honnêtes et l’ont reconnu dans leur évaluation comme on peut le voir dans le graphique ci-dessus.

j. Le professeur
Les étudiants ont bien évalué la motivation, les connaissances et l’animation du professeur.
Mon auto-évaluation est plus critique, en ce sens que je pense que j’aurais pu « vendre » le wiki de façon plus efficace aux étudiants. Une rétroaction hebdomadaire sur les visites du wiki par des internautes du monde entier aurait aussi pu les motiver davantage.

Dans le prochain message je terminerai mon compte-rendu de ce projet en présentant une analyse critique du wiki comme outil de collaboration en enseignement collégial en me fondant sur les résultats de cette expérience.

lundi 10 mai 2010

2. La grille d'évaluation du wiki

Dans cette deuxième partie, je décris la grille d'analyse ainsi que les sources d'information que j'ai utilisées pour évaluer le wiki.

L’objectif du wiki était de préparer les étudiants au travail collaboratif et de fournir une base d’étude commune pour les examens.

Pour être en mesure d’effectuer une analyse critique objective de l’utilisation du wiki dans le cadre du cours de promotion des ventes j’ai développé une grille d’évaluation fondée sur la théorie de l’activité.

J’ai décidé d’évaluer, le succès de l’activité d’une part, et d’autre part, chacune des dimensions suggérées par la théorie de l’activité, afin de pouvoir, le cas échéant, améliorer le scénario pédagogique utilisé pour l’activité.


La grille d’évaluation ainsi que les résultats du travail d’évaluation sont présentés dans le tableau ci-dessous. Chaque dimension est évaluée sur une échelle en 5 points (1=pas du tout satisfaisant à 5=tout à fait satisfaisant).

Les sources d’information utilisées pour informer la grille d’évaluation
Trois sources d’information m’ont permis d’informer le tableau ci-dessus : les statistiques fournies par le wiki et le fil RSS, les perceptions des étudiants et finalement mes perceptions.

Les statistiques fournies par Wikispaces et par le flux RSS
Wikispaces fournit des information concernant chaque membre du wiki, en particulier le nombre de pages éditées, ainsi que des statistiques générales sur le wiki, comme le nombre d’éditions quotidiennes. Le flux RSS a permis de classer les contributions de chaque membre de façon chronologique et la contribution principale de chaque membre a été mesurée en nombre de mots.

La mesure des perceptions des étudiants
Afin de pouvoir faire une analyse critique objective de l’utilisation du wiki dans le projet, j’ai développé un outil d’évaluation que j’ai soumis aux étudiants. Ce questionnaire inspiré de celui élaboré par Temperman,De Lièvre et Lenz (2009)comprend 43 énoncés avec lesquels les étudiants devaient indiquer leur degré d’accord en utilisant une échelle de Likert en 5 points (de 1=tout à fait en désaccord à 5=tout à fait d’accord).

Les 43 énoncés cherchaient à évaluer la perception globale des étudiants par rapport à l’activité (contribution à l’apprentissage de la matière du cours, amélioration des habiletés de collaboration, degré de collaboration induit par l’activité) ainsi que les perceptions des étudiants concernant les dimensions de l’activité et présentées dans le tableau ci-dessus.
Le graphique qui suit présente les moyennes obtenues par chacun des énoncés pour chacun des deux groupes d’étudiants ayant évalué le wiki. On peut d’ores et déjà y constater de grandes différences dans les perceptions des étudiants des deux groupes, le groupe 010 ayant été beaucoup plus positif, motivé et enthousiaste par rapport au travail sur le wiki.

Mon prochain message présentera les résultats détaillés de l'évaluation

Référence:
Temperman, G., De Lièvre, B. et Lenz, D. (2009). Écrire à plusieurs mains dans un wiki : analyse croisée des processus et des perceptions des apprenants in Develotte C., Mangenot F., Nissen E. (2009) Actes du colloque Epal 2009, 1-13. Retrieved November 8, 2009 from http://w3.u-grenoble3.fr/epal/dossier/06_act/pdf/epal2009-tempermann-delievre-lenz.pdf

samedi 8 mai 2010

1. Présentation du projet

Dans ce premier message, je résume deux rapports précédents qui décrivaient la genèse et le cadre conceptuel du projet.

Dans le cadre du cours « Promotion des ventes », que j’ai enseigné à la Cité collégiale dans le contexte du programme de Publicité à l’hiver 2010, j’ai décidé de faire réaliser aux étudiants un wiki sur les différentes méthodes de promotion des ventes.
Mon choix du wiki comme outil pédagogique vient de l’observation que les étudiants en milieu collégial sont peu familiers avec le travail collaboratif. Les enseignants utilisent souvent des méthodes coopératives traditionnelles telles que les projets d’équipes et les études de cas en groupe. Cependant, on réalise, avec le temps, que la collaboration et les échanges entre les étudiants sont très minimes et se limitent souvent à des discussions relatives au partage des tâches et à la production physique du document final. Finalement, il y a très peu d’interactions cognitivement significatives entre les étudiants.

Par ailleurs, dans l’enseignement professionnel au collégial, les activités de travail d’équipe posent des difficultés d’ordre logistique aux étudiants (conflits d’horaires, transport…). Dans ce contexte, le wiki me semblait un outil approprié pour mieux préparer les étudiants à l’aspect collaboratif du marché du travail et faciliter le travail d’équipe en leur offrant un outil de collaboration asynchrone disponible à distance. Le projet consistait à faire réaliser aux étudiants un wiki présentant les différentes méthodes de promotion des ventes. Les étudiants étaient regroupés en équipes et devaient intégrer des dossiers sur chacune des méthodes de promotion des ventes dans le wiki. Le wiki devait servir de base d’étude pour la classe et remplacer le manuel. Les étudiants inscrits au cours étaient deux groupes de première année de niveau collégial (17-18 ans) d’une quinzaine d’étudiants chacun. Pour moi, ce projet avait pour objectif d’identifier la pertinence et les conditions d’utilisation d’une technologie (wiki) dans le cadre d’activités à distance pour un cours en présentiel et d’identifier quelles seraient les modalités les plus favorables l’utilisation de cette technologie

Le wiki
Le terme « wiki wiki» est un mot Hawaïen signifiant « rapide » (Wikipédia). Les wikis, dont l’exemple le plus connu est l’encyclopédie en ligne Wikipedia, sont des outils qui permettent la co-construction virtuelle de contenu. De la même façon que sur Wikipedia, tout individu peut développer ou modifier le contenu d’un wiki, pour autant que l’administrateur lui en donne l’autorisation. Selon Godwin & Jones (2003, cité par Develotte et al., 2009, p.2) « …Un wiki peut se définir comme une zone partagée de connaissances accessible depuis un navigateur web et qui s’accroît au fil du temps en fonction des modifications réalisées par les différents utilisateurs
Pour Sancler (2008, p. 143), « Le wiki, utilisé de manière convenable, peut devenir un instrument favorisant l’apprentissage collaboratif puisqu’il permet à chacun de contribuer dans un espace par ses interventions et ses idées sur un sujet déterminé. Les collaborateurs participent étant conscients que leurs apports peuvent être modifiés ou même éliminés par d’autres s’ils le considèrent nécessaire. »

Le cadre conceptuel
a. La théorie de l’activité
Mon projet se situe dans une perspective interactionniste, c'est-à-dire que je considère l’apprentissage comme résultant des différentes interactions qui interviennent dans la situation d’apprentissage. Les caractéristiques de l’apprenant, de la tâche d’apprentissage, de l’enseignant, des co-apprenants, du matériel pédagogique, de l’environnement physique, des outils disponibles etc. ont une influence directe sur l’apprentissage mais ces éléments interagissent aussi sur le résultat. J’ai donc décidé d’articuler mon projet autour de la théorie de l’activité, développée par Lev Vygotsky et Alexis Leontiev et par la suite élargie par Yrjö Engestrôm (Issroff et Scallon, 2002, pp. 77-78).

« Un modèle moderne de la théorie de l’activité comprend six éléments et se structure comme suit: (1) Le sujet : une personne ou un groupe qui réalise une activité (2) L’objet : la réponse à une question ou à un objet d’apprentissage (3) Les instruments : outils mentaux ou physiques qui interviennent lors de l’activité (4) Les règles : étapes à suivre qui organisent et établissent des contraintes, y compris les règles physiques et de procédure, de même que les règlements et les conventions (5) La communauté : une ou plusieurs parties externes qui influencent l’activité, y compris les éléments culturo-historiques et environnementaux (6) La division du travail : la délimitation des tâches et les niveaux de pouvoir. (Cordes, 2009)»
Le modèle d’Engeström est présenté à la figure 1.

Figure 1 : Structure de base d’une activité d’une communauté (Lewis, 1999, p.18)).

La figure ci-dessous présente la façon dont j’ai opérationnalisé les dimensions de l’activité de participation au wiki, en utilisant la théorie de l’activité. La partie supérieure du graphique présente les éléments constitutifs de l’activité, les boîtes situées en dessous précisent à quoi chacun de ces éléments correspond dans le contexte de l’activité de réalisation du wiki et les dimensions de ces éléments que j’ai prises en compte lors de l’élaboration du projet. (Cliquez sur le graphique pour l'agrandir)

b. Distinction entre collaboration et cooperation
Bien que collaboration et coopération soient souvent utilisés de façon indifférenciées par certains auteurs, nous adopterons la distinction effectuée par Henri et Lundgren-Cayrol. Collaboration et coopération se ressemblent par le fait qu’il s’agit de travail de groupe effectué en vue d’atteindre un but commun. Cependant, la coopération se distingue par le fait qu’elle « repose sur la division des tâches et des responsabilités au sein du groupe. (…) Chaque apprenant participe à l’atteinte de ce but par un apport spécifique à l’œuvre collective (Henri et Lundgren-Cayrol, 2001, p.26) ». Les apprenants sont donc fortement interdépendants puisque leurs tâches sont complémentaires et l’atteinte de l’objectif global se fait par la juxtaposition des contributions des co-apprenants. Dans ce contexte, l’enseignant a un niveau de contrôle relativement élevé, déterminant, par exemple, la structure des équipes ou affectant les tâches aux différents participants. Par opposition, quand il y a collaboration, chaque individu contribue à l’atteinte du but accepté par le groupe, tout le monde contribue à l’ensemble du travail. L’enseignant ou le tuteur a aussi un contrôle bien moindre sur le fonctionnement du groupe et l’accomplissement de la tâche. Les apprenants ont beaucoup plus de liberté.

La distinction entre collaboration et coopération n’est pas coupée au couteau. Il s’agit plutôt d’un continuum. Selon Henri et Lundgren-Cayrol (2001, p. 24), « le choix entre une démarche coopérative ou collaborative se fait selon la maturité des apprenants, leur autonomie et leur capacité de contrôler leur apprentissage. (…) La démarche de coopération poursuit donc une double but : apprendre le contenu, mais aussi apprendre à travailler en groupe de manière efficace et à devenir autonome.

Les décisions
a. Le choix d'une tâche à accomplir
Les étudiants qui ont effectué le travail sur le wiki étaient jeunes , peu autonomes et peu habitués au travail collaboratif. J’ai donc opté pour une activité coopérative (recherche en équipe) mais avec des aspects collaboratifs (rédaction, contributions aux travaux des autres équipes), pour développer chez eux les habiletés nécessaires à la collaboration.

b. Le choix d’un wiki
Pour le néophyte, le choix d’un wiki peut s’avérer complexe. Pour guider mon choix j’ai utilisé l’outil « Wikimatrix » (http://www.wikimatrix.org/). Cet outil permet de sélectionner un wiki en fonction de différents critères de décision parmi un choix d’environ 120 wikis. Mon choix final s’est porté sur Wikispaces en raison de sa gratuité, de sa simplicité d’utilisation et de ses fonctionnalités, en particulier concernant le suivi des contributions.

c. Le choix d'une démarche d'encadrement
Le choix d’une démarche d’encadrement a exigé des compromis entre la volonté de donner une autonomie et une liberté aux étudiants afin d’augmenter leur motivation d’une part, mais de leur fournir suffisamment de structure afin de ne pas les perdre d’autre part.
Par conséquent, j’ai choisi d’avoir un encadrement serré au niveau du processus et de laisser beaucoup de liberté aux étudiants pour ce qui est du contenu
Pour ce qui est du processus, j’ai opté pour:

  • une formation initiale en classe sur le fonctionnement du wiki;
  • un suivi serré lors des premières semaines du cours;
  • une activité brise-glace obligatoire pour familiariser les étudiants avec le fonctionnement du wiki (page de présentation des équipes);
  • des rappels hebdomadaires afin de limiter le facteur de procrastination et augmenter le niveau de motivation des étudiants.

Pour ce qui est du contenu, mes seules interventions ont été les suivantes:

  • Répartir le travail entre les équipes;
  • Vérifier les contributions afin de souligner les erreurs ou les points de vue discutables.

La démarche d’encadrement a été facilitée par l’utilisation d’un flux RSS qui m’a permis de suivre chronologiquement les modifications apportées aux wikis.

Le travail a été réalisé par les étudiants entre janvier et avril 2010. Le lecteur intéressé pourra en voir le résultats aux adresses suivantes :
http://promotion-groupe-010.wikispaces.com/ et http://promotion-groupe-020.wikispaces.com/

Dans mes prochains messages je présenterai l'évaluation du projet.


Références:
Cordes, S. (2009). Le rôle de l’éducation multimodale dans l’enseignement de la bibliothéconomie au 21ème siècle : les perspectives d’avenir. Proceedings .World Library and Information Congress: 75th IFLA General Conference and Assembly "Libraries create futures: Building on cultural heritage" Traduction parCatherine Stassin. Retrieved March 5, 2010 from http://www.ifla.org/files/hq/papers/ifla75/94-cordes-fr.pdf


Issroff, K., Scanlon, E. (2002). Using technology in Higher Education: an Activity Theory perspective. Journal of Computer Assisted Learning 18 (1), 77-83. DOI: 10.1046/j.0266-4909.2001.00213.x


Henri, F., Lundgren-Cayrol, K. (2001). Vers une définition de l’apprentissage collaboratif Apprentissage collaboratif à distance (pp. 9-43). Sainte-Foy : Presses de l’Université du Québec.

Jones P. (2007) When a wiki is the way: Exploring the use of a wiki in a constructively aligned learning design in Atkinson, R.J., McBeath, C., Soong, S. K. A. & Cheers, C. (Eds) (2007). ICT: Providing choices for learners and learning. Proceedings ascilite Singapore 2007. Centre for Educational Development, Nanyang Technological University, Singapore, 460-467.Retrieved November 2, 2009 from http://www.ascilite.org.au/conferences/singapore07/procs/jones-p.pdf

Sancler, J. V., (2008) Le Wiki, un Outil Web 2.0 dans l’Enseignement du FLE, Synergies 4, 140-149. Retrieved November 10, 2009 from http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Venezuela4/syner-7.pdf